Sepsis en Suisse : un danger sous-estimé et ses coûts préoccupants

Santé

Une menace silencieuse aux proportions inquiétantes

Le risque lié au sepsis demeure souvent sous-estimé en Suisse, déplore Nora Lüthi, leader du rapport et directrice du Programme national contre le sepsis. Selon elle, cette infection grave est aussi fréquente que d’autres pathologies telles que les accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou les infarctus du myocarde.

Cependant, le rapport ne recense que les cas pris en charge par les établissements hospitaliers, ce qui laisse penser que la réalité pourrait être bien plus étendue. En effet, il est raisonnable de penser qu’un certain nombre de cas ne sont pas détectés ou comptabilisés, ce qui pourrait faire grimper significativement la charge de morbidité liée au sepsis en Suisse, comme indiqué dans le communiqué officiel.

Une issue fatale pour un cinquième des patients traités

Le sepsis, définie comme une réaction extrême de l’organisme face à une infection pouvant entraîner des défaillances d’organes et un coma, touche toutes les tranches d’âge. Toutefois, les populations les plus vulnérables restent les personnes âgées et les nourrissons. Environ 20% des patients hospitalisés pour cette infection en décèdent, ce qui correspond à environ 4 000 morts par an dans le pays.

Une maladie méconnue aux symptômes difficiles à identifier

Il y a douze ans, Jeanne-Chantal de Flaugergue, ancienne collaboratrice du CHUV, raconte avoir cru souffrir d’une pneumonie lors de son retour d’Asie. Malgré un traitement antibiotique, elle a sombré dans le coma durant la nuit et a nécessité une prise en charge hospitalière intensive. Son rétablissement a duré plusieurs semaines, durant lesquelles elle était dans un état très affaibli.

Ce qu’elle a vécu était en réalité un sepsis, une réaction extrême du corps à une infection, pouvant entraîner un coma et des défaillances organiques. La maladie reste encore peu reconnue, en raison de la diversité de ses manifestations. Sylvain Meylan, médecin au CHUV et répondant hospitalier du Swiss Sepsis Program, précise que ses symptômes incluent notamment une hypotension, des troubles respiratoires ou encore des altérations de l’état de conscience, rendant le diagnostic complexe.

Un coût économique considérable pour la Suisse

Les impacts financiers liés au sepsis pèsent lourdement sur le système de santé helvétique. Selon le rapport, près de 40% des cas diagnostiqués en milieu hospitalier nécessitent une prise en charge en unité de soins intensifs. Le coût moyen par patient s’élève à environ 50 000 francs, et avec 20 000 hospitalisations annuelles, le total atteint un milliard de francs.

Ce montant pourrait doubler si l’on intègre les dépenses liées à la réhabilitation, au suivi médical et au traitement des complications à long terme sur une période de trois ans. De plus, le rapport ne prend pas en compte les séquelles durables, tant physiques que psychologiques, causées par un sepsis.

Appel à une meilleure prise en charge et coordination nationale

Le professeur Luregn Schlapbach, médecin-chef aux soins intensifs de l’Hôpital pédiatrique universitaire de Zurich, insiste sur l’importance de la détection et du traitement précoces du sepsis, ainsi que du suivi de ces patients. Il soulève également l’absence d’une coordination nationale efficace pour la recherche sur cette pathologie, ce qui pourrait accélérer l’intégration des résultats scientifiques dans la pratique médicale.

Selon lui, une attention renforcée à la sensibilisation, à la prévention, au diagnostic précis et à une gestion optimale du sepsis est cruciale pour réduire le lourd tribut qu’il impose à la société suisse.