Jeunes Indiens recrutés en Russie : deux disparitions sur le front en Ukraine et les mécanismes de recrutement

Vaud

Contexte et parcours des jeunes de Madanheri

Dans le village de Madanheri, situé à environ 130 kilomètres de New Delhi, deux jeunes hommes sont portés disparus en Ukraine après avoir été recrutés de force dans l’armée russe au cours du mois d’août.

Aman, 24 ans, n’a plus donné signe de vie depuis la mi-octobre. L’année précédente, il était parti en Russie avec un ami d’enfance pour trouver un emploi et les deux avaient obtenu un petit travail à Moscou. Suite à la faillite de l’entreprise, Aman a dû quitter la capitale pour chercher une nouvelle activité.

Le contrat d’embauche était rédigé en russe et il ne l’a pas compris; il a tenté de le scanner pour le traduire, mais des militaires russes auraient saisi son téléphone.

Aashish, frère d’Aman, explique que le visa arrivait à expiration et que son frère aurait été piégé par deux recruteurs russes qui proposaient un poste de vigile bien rémunéré.

Selon lui, lors de la signature, le document était rédigé en russe et il n’avait pas les moyens de le comprendre; l’échange ne lui a pas laissé l’opportunité de prendre des photos et de vérifier le contenu, selon sa version. L’offre était présentée comme une option à accepter ou à refuser.

Réseaux de recrutement et implication militaire

Sonu, ami d’Aman, a aussi choisi de s’engager aux côtés d’Aman. La famille accuse deux ressortissants indiens basés en Russie de les avoir trompés. Ils affirment que de nombreux agents recruteurs opèrent sur place, promettant un poste de gardien et des tâches secondaires; en réalité, les deux jeunes ont été envoyés sur le front.

En outre, l’an dernier, le Bureau indien anticriminalité avait annoncé avoir démantelé un réseau de traite d’êtres humains basé en Inde et en Russie. Cette organisation séduisait ses victimes par la promesse de salaires élevés pour des postes subalternes dans l’armée russe, et les victimes se retrouvaient envoyées en Ukraine pour combattre.

Rôle stratégique malgré l’absence de formation

D’après Yohann Michel, chercheur à l’Institut d’études de stratégie et de défense à Lyon, des jeunes sans entraînement militaire servent de chair à canon, notamment en première ligne pour repérer les positions ennemies et se faire tirer dessus. Ils peuvent aussi occuper des positions défensives initiales dans des zones non offensives, agissant comme signaux d’alerte lorsque les tirs se font entendre.

Épisodes récents et appels au rapatriement

Le 25 août, Aman a envoyé une vidéo depuis une tranchée en Ukraine, décrivant les bombardements et implorant le rapatriement par le gouvernement indien; sa demande est restée sans réponse. Sonu n’est jamais revenu. Le 19 septembre, un officier russe a contacté la famille via Telegram pour annoncer la disparition et le transfert du corps.